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Koffi Mahouley Dossou, un artiste-peintre pétri d'inspiration africaine !

Dernière mise à jour : 14 juin

Rencontre avec un orfèvre de la gouache acrylique et du tissu africain


" Nous sommes le produit de nos cultures, je revendique la réappropriation

de nos valeurs " Maître Koffi DOSSOU, l’artiste plasticien qui fait parler ses tableaux

au travers de ses émotions.


Dans les méandres de ses souvenirs à la recherche d’une harmonie spirituelle cachée où

l’abstrait et le figuratif donnent force aux couleurs et mettent en évidence les rythmes

mélodieux du Sahel et les cadences envoûtantes des danses de la République du Bénin et du Togo, l’artiste-plasticien Koffi DOSSOU, fait parler ses tableaux.

De son vrai nom, Jean-Marie Koffi Mahouley DOSSOU, l’Artiste-Plasticien Graphiste-

Designer, né à Zinder, au Nige,r en 1953, d’un père Togolais et d’une mère Nigérienne, a, au

cours d’une interview accordée à notre rédaction, remonté le temps. Il revient sur sa dernière

exposition, l’an dernier au Togo et sur son parcours « itinérant » entre l’Afrique et l’Europe.


Qui est Maître Koffi Dossou ?


Je suis Jean-Marie koffi Mahouley Dossou à l’état civil. Je suis né à Zinder

au Niger en 1953, d’un père Togolais et d’une mère Nigérienne. Mon envie pour l’art apparaît

très tôt à l’adolescence lorsque, très souvent, je jouais avec le pantone de mon père dans son

bureau. Mon cursus scolaire aussi itinérant fût-il, me fait rencontrer au Collège Saint Joseph

de Lomé mon premier professeur de dessin M. Kpéglo. Au Lycée de Tokoin (Lomé

toujours), je fis la connaissance du Grand peintre Professeur Paul Ahyi qui m’encouragea et

me dirigea vers la carrière artistique. Ce fut le déclic !

Après mes études de Lettres Modernes à l’Université du Bénin d’alors (actuelle université de

Lomé), j’obtins une bourse et entrai à l’Académie des beaux-Arts de Pérouse en Italie (1979-

1983), nanti du diplôme qui me permet d’intégrer le monde du graphisme. Et depuis lors, je

vis et travaille en Italie actuellement comme artiste peintre, graphiste, webdesigner,

consultant et formateur en communication visuelle et interculturelle.


L’art vous a-t-il presque choisi depuis l’enfance ?


Mon parcours a été simple. Comme je l’ai dit tout haut, j’ai fréquenté le lycée

de Tokoin, d’abord le Collège Saint Joseph (Lomé-Togo, Ndlr), j’ai rencontré Maître Kpéglo

qui a été mon premier professeur de dessin qui m’a enseigné beaucoup de techniques. Ensuite,

je suis allé au lycée de Tokoin, là, j’ai rencontré Maître Paul Ahyi, lui aussi m’a donné

quelque chose. Il a été le premier à me donner un contrat, je peux dire. Par la décoration de

l’hôtel de la Paix dans les années 1970. J’étais vraiment petit quand il m’a donné ce contrat,

j’avais eu un peu peur. Mais j’ai fait le travail, il était content. Et à la fin du travail, il m’a

appelé et il m’a donné quatre-vingt-onze mille francs (91.0000Fr) CFA.

À l’époque mon père, gagnait deux cent mille francs (200.000Fr) CFA. J’ai apporté l’argent à

la maison, mon père fut surpris, il n’en croyait pas à ses yeux. Parce qu’il m’a toujours

encouragé dans le dessin depuis que j’étais gosse. Il m’a toujours acheté des couleurs, du

papier, de bouquins et figurez-vous, acheter à un enfant un livre de cinq-mille francs (5000 CFA) était symbolique. Ce livre comme ‘’ précieux trésor ’’, je l’ai encore jusqu’aujourd’hui,

je le montre de temps en temps à mon fils pour lui dire, voilà ce que mon père m’a acheté

pour m’encourager à faire ce métier.

Donc après, Maître Paul Ahyi a insisté pour que j’aille faire l’académie des beaux-arts, car il

a vu en moi quelque chose qui était différent des autres. Je ne dessinais pas comme les autres,

je faisais tout comme je le sentais. Et à la vue, il n’y a rien de Paul Ahyi, je suis complètement

passé à côté. J’ai pris son goût de la couleur, sa technique et puis après, les formes, je l’ai

travaillé.


Très simple ! Des matériaux qui ne coûtent pas assez cher. Des matériaux que

l’on pourrait retrouver facilement. De la gouache acrylique. Je la mélange avec de l’eau, ce

n’est pas toxique. J’utilise des tissus africains, de temps en temps des morceaux de tissus.

J’utilise aussi de l’aérographe, ceci vient de ma culture publicitaire parce que je suis aussi

publiciste. J’ai un studio de publicité à Pérouse en Italie. Donc l’aérographe, c’était au temps

de l’académie des beaux-arts, quand on est sorti, il n’y avait pas encore d’ordinateurs, donc on devait tout dessiner à la main. Et pour faire les dégradés et aussi les retouches, il fallait

absolument utiliser un aérographe, même pour créer des ombres, du clair-obscur, des

silhouettes. L’aérographe est polyvalent, on peut l’utiliser n’importe comment.


Du haut de la 74 -ème exposition de toute votre carrière artistique, avec 5

passages à Lomé dont la dernière intitulée « Émotions Ancestrales », remonte en mai de

l’année dernière, dites-nous, pourquoi avoir baptisé cette exposition « Emotions

Ancestrales » ?


C’est une sorte d’exhortation d’un retour aux sources. « Emotions

Ancestrales », ce sont mes dernières souffrances, si je peux dire. Mes derniers maux de tête

que j’ai essayé de mettre sur toile. Et je choisis le Togo, parce que c’est mon pays, même si je

suis né au Niger, j’ai vécu 16 ans au Togo et je me sens vraiment en devoir de montrer ce que

j’ai pu faire jusqu’ici. Les résultats de mes études, le faire au Togo, ça été un choix de cœur.


Quelle particularité revêt pour vous cette cinquième exposition ?


La cinquième exposition au Togo à Lomé, 2 à la galerie Gattobar, une 1

au Centre Culturel Français sous la direction de Jacques Roux, Directeur d’alors en 1992.

Cette 74 -ème exposition est assez particulière : je suis arrivé à un certain niveau

de mon art, je voulais monter au créneau et montrer vraiment le résultat de tous mes efforts,

de toutes mes recherches puisque, j’ai fait beaucoup de recherches en ce qui concerne les

couleurs, en ce qui concerne les formes. Je suis enseignant de communication visuelle, je suis graphiste donc j’ai, eu à travailler beaucoup avec les couleurs, à les analyser et cette exposition est la somme de tout le travail que j'ai abattu jusqu'à présent. Je réalise que j’ai pu sortir le meilleur de moi-même pour le moment. La prochaine sera encore mieux.




74 expositions, c’est énorme, le parcours n’a pas été du tout facile si je ne me trompe?


Non pas du tout facile. Parce que je vis en Italie et le racisme en Italie est tel

que les Noirs ont d’énormes difficultés à s’en sortir. Mais je suis un combattant et j’ai

combattu pendant plus de 40 ans et je ne me suis jamais laissé abattre par les difficultés. Je

suis arrivé à avoir même des prix, des distinctions, ça m’a un peu galvanisé, ça m’a donné un

mental assez fort. Et je dois dire aujourd’hui que je suis respecté, j’ai une bonne réputation

dans le monde de l’art et du graphisme.


Vos sujets de prédilection tournent essentiellement autour de deux thèmes majeures

la femme et l’Afrique, elles constituent la trame principale dans votre travail.

Pourquoi ces deux thèmes vous sont si chers ?



Ma peinture tire sa source bien évidemment de la culture africaine. On

s’en aperçoit clairement dans la lecture et l’usage de matériels simples tels des tissus africains aux motifs d’expression et d’affirmation de l’identité culturelle africaine. Des retouches aux dégradés créant des ombres du clair-obscur, des

masques et silhouettes essentiellement assis sur des symboles aux portées animistes qui traduisent la force, la puissance de l’Afrique.

Au besoin d’affirmation, j’associe bien évidemment, la revendication d’identité

culturelle africaine. Nous sommes le produit de nos cultures. Ainsi, je revendique la

réappropriation de nos valeurs, sinon notre héritage qui soient propres à l’Afrique Noire,

moderne et contemporaine consciente de ses réalités aussi bien culturelles que traditionnelles.

Je mets en exergue l’importance de la question de l’oralité et aussi mon appartenance

africaine au cœur de mes créations artistiques. La femme occupe une place de choix

notamment les ‘’Amazones de la République du Bénin et les ‘’Nana Benz’’ du Togo.

Une manière à moi par excellence, de rendre toujours hommage à ces grandes

dames africaines qui ont fait la fierté de tout un continent de par leurs divers engagements et

qui, jusqu’aujourd’hui suscitent respect et admiration.



Qu'est-ce qui est à la base de cette passion pérenne pour la peinture?

L’observation, la réflexion, l’humilité d’apprendre des autres parce que je

regarde beaucoup les autres pour essayer de comprendre leur mécanisme mental et essayer de créer quelque chose qui exprime mon état d’âme. J’ai fait des tableaux comme le Jazz and

Blues. Je peins d’habitude avec la musique Jazz and Blues, du Pop parfois. J’aime Deby King,

Sona Jobartey et Youssou N’Dour, tous ces rythmes m'inspirent tout autant et me ramènent à mon Sahel natal, le Niger pays de ma mère. Tous ces éléments cités constituent une source inépuisable de mes inspirations.


Quel regard portez- vous sur l’art Togolais actuel ?


J’ai fait un petit tour, les artistes Togolais sont très forts. J’ai connu quelques-

uns notamment, Sokey Edorh, Coffi Teor…etc. J’ai connu feu Jimmy comme chanteur,

comme peintre. Il me plait aussi beaucoup. Je suis très content de l’évolution de l’art Togolais

de toute façon.

Selon vous l’art Togolais se porte-t-il bien ?


Oui, l’art Togolais se porte bien. J’espère qu’il va encore évoluer plus que ça.

Nous avons de jeunes peintres qu’il faut naturellement essayer d’aider, de canaliser,

d’encadrer pour créer une nouvelle génération de peintres.

Êtes-vous disposez à apporter de votre expérience ?


Bien sûr. C’est mon but. Je crois que garder mon expérience pour moi ne sert

à rien, il faut la partager, il faut la faire connaitre. Je suis prêt à donner des Works shop, des

masters class, sinon des laboratoires pour montrer aux jeunes comment s’en sortir, comment

peindre, faire connaitre le marché de l’art. Parce que c’est un marché très difficile, donc il faut

qu’ils connaissent et qu’ils en profitent. Donc mon expérience est disponible à la jeune

génération.



Vous arrive-t-il d'être nostalgique ?


Beaucoup ! Je suis très nostalgique. Quand je peins, je peins surtout les

émotions de mon passé, les émotions que j’ai eu à affronter, mes peurs, mes espoirs, mes

désespoirs… Je suis très nostalgique quand je pense à mon pays le Togo, à Lomé à mon enfance au Niger, à mon enfance au Bénin, la traversée du littoral avec mon père, Ce sont des expériences que j'ai gardées en moi et qui réapparaissent de temps en temps.


Vous faites la fierté de tout un pays, qu’est-ce que cela vous fait ?


Une émotion très forte ! Dans les rues, je suis souvent apostrophé par du

monde, les amateurs de l’art, ainsi que les passionnés de la chose. Alors de manière modeste, ça me fait chaud au cœur d’être reconnu. Dans les années 1992, j’avais une certaine notoriété à Lomé et puis j’ai disparu. Et reprendre cette notoriété me fait vraiment chaud au cœur. J’en suis très fier. C’est un peu ça.


Si vous deviez donner un conseil à la jeune génération de plasticiens Togolais,

que leur diriez- vous ?


D’avoir le courage d’essayer. Il faut essayer jusqu’à ce que l’on arrive au

point où on veut. De ne pas s’arrêter. Je leur dis surtout d’avoir le courage, de libérer leur

talent parce que actuellement le marché est tellement dur que certains se découragent. Ils se

disent : « je ne vais jamais vendre », mais c’est le talent qui vend et tôt ou tard si vous l’avez,

il sortira et vous donnera satisfaction ! Surtout s’amuser avec ce qu’on fait.

Je me dis toujours, si je ne m’amusais pas en peignant, je ne saurais pas la valeur de ce que je fais. Je m’amuse énormément tout en restant focus. Je me mets à écouter de la musique, je chante à haute voix, puis je peins, c’est comme un jeu pour moi. Il faut être moins sérieux dans l’art. Il ne faut pas penser que c’est un travail que je dois faire coûte que coûte, il faut se libérer. À titre d'exemple, je n’accepte que rarement les œuvres commandées, parce que après tout, je peins d'abord pour moi-même. Je ne peins pas les autres. On ne peut pas me dire, faites moi ceci, je veux cela, non ! Même si parfois je l’ai fait, c’est

pour avoir tenté cette expérience, voir comment les personnes réagissent. Je préfère toujours

peindre pour moi-même, pour ma joie et bien évidemment pour les autres aussi pour qu’ils

voient, qu’ils ressentent ce que je ressens. Mes tableaux sont des émotions que je veux

transmettre aux gens.

Quelle sera la couleur de 2024 en termes de projets, sinon des expositions en

vue, que réservez -vous au public ?



De nombreuses surprises en perspectives. De nouvelles créations sont en

cours de finition, les retouches, quelques coups de pinceaux encore pour certains des tableaux.

J’essaie toujours d’innover sur chaque projet ou exposition. Le but ici, c’est justement de

rompre avec la monotonie. Je convie le public à de nouvelles collections très prochainement.

Je travaille actuellement d’arrache-pied sur de nouvelles productions suite à des recherches

récemment effectuées. C’est une année bien chargée avec une série de tournée dans les

capitales africaines, telles Addis-Abeba (Ethiopie), Abidjan (Côte d’Ivoire), Accra (Ghana),

Lagos (Nigéria), qui accueilleront les prochaines expositions.




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Incroyable et fabuleux de découvrir des artistes aussi talentueux 😍

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